• Ecodesign : penser le produit en boucle

    Par Sophie Fabregat

    Peu à peu la perception de la notion de produit change dans le design. Si longtemps l’esthétique et le confort ont primé, aujourd’hui, l’usage et le cycle de vie du produit commencent à être pris en compte. Simple mode ou véritable tendance de fond?

    Des meubles en carton, des cadres en cannettes de soda recyclées, des objets détournés de leur but premier… De nombreuses personnes ont une idée faussée de l’écodesign. Si ces exemples visent effectivement à réduire l’impact des produits sur l’environnement, il serait réducteur de croire qu’ils désignent à eux seuls l’écoconception. Donner une seconde vie aux produits : oui, mais l’objectif premier de l’ecodesign est d’abord d’assurer au produit une première vie respectueuse de l’environnement. Comment ? En changeant la perception du produit dès sa conception : il ne s’agit plus seulement de faire du beau, mais de réfléchir à l’usage du produit sur la durée et penser à sa fin de vie dès sa naissance. A quoi bon concevoir un produit dans le respect de l’environnement si son utilisation est ensuite énergivore, unique ou encore si celle-ci mène à une surconsommation de matières premières ?

    Penser en terme d’usage et non plus de produit

    Aucun produit ne parcourt son cycle de vie sans consommer ou polluer. Des ressources minérales, végétales ou animales son consommées pour l’obtention des matières premières, la fabrication, transformation, distribution, consommation sont également à l’origine de consommations d’énergie et de rejets de substances dans l’eau, l’air ou les sols. Le zéro impact n’existe pas, quelque soit le secteur, note Brigitte Kahane, fondatrice de Pimliko, cabinet innovation design éco-responsable. Il y aura toujours des impacts. L’écodesign, ou écoconception, est une démarche de progression continue. Il s’agit d’améliorer toujours plus.
    L’ecodesign vise donc à proposer au consommateur des solutions responsables. L’ensemble des étapes de vie du produit, du berceau à la tombe, sont réfléchies pour être respectueuses de l’environnement. Dès l’amont, c’est-à-dire dès la conception, l’ecodesigner va déterminer les axes d’amélioration qui interviendront tout au long du cycle de vie des produits (matières premières, production, distribution, utilisation, élimination ou recyclage) de façon à réduire l’impact sur l’environnement (eau, sol, air, bruits, déchets, ressources naturelles, énergie).

    Il s’agira par exemple d’utiliser des matières premières dont l’extraction et la transformation sont peu énergivores, d’optimiser le transport des produits en réduisant l’emballage, de rendre vertueux le comportement du consommateur (passer de l’usage unique à la réutilisation par exemple), de faciliter la valorisation du produit lors de sa fin de vie. Certaines personnes vont travailler sur l’habillage vert, d’autres sur la question des déchets, d’autres se concentrent sur les transports… La dimension logistique, par exemple, est très importante, en amont et en aval. En aval, on s’oriente vers des produits plus légers, compactables, pliables… Et en amont, il s’agit de réfléchir au transport des matières premières. C’est bien de fabriquer un objet en bambou, sauf si celui-ci a dû traverser la planète ! explique Brigitte Kahane.

    Une tendance qui s’installe doucement chez les professionnels

    Selon une étude commandée par le CDRA (Centre du Design Rhône-Alpes), seuls 15 % des designers intègreraient aujourd’hui les critères environnementaux au moment de la conception d’un produit. Défaut d’information, de formation, démarche trop contraignante ?

    Beaucoup pensent que l’écoconception induit des coûts supplémentaires. Peu pensent qu’à l’arrivée, cette démarche peut mener à une réduction des coûts, à chaque étape de vie du produit. Plus on intervient en amont, plus il est facile d’intégrer la démarche, note la fondatrice de Pimliko. Pour convaincre, de nombreuses initiatives naissent ça et là. Un observatoire de l’ecodesign devrait voir le jour à la rentrée 2009, porté par Pimliko, l’Institut Français du Design et la société de conseil Evea.

    De son côté, l’Institut Français du Design est en contact avec des écoles de designers et le monde de l’entreprise et forme des groupes d’études autour de projets communs. En 2010, le Janus, label officiel de design issu de l’arrêté ministériel français du 13 novembre 1953, devrait intégrer une mention ecodesign, afin de reconnaître et valoriser les produits et services dont l’impact sur l’environnement est réduit, dès la sélection des matériaux, lors de la fabrication du produit, jusqu’à la fin de vie en passant par la distribution et l’usage qu’en fait le consommateur.

    La Revue du Design remercie le site Internet Actu-environnement.com, qui l’a autorisé à reprendre et à présenter cet article.

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