• Interview: François-Xavier Loucheur

    Nous rencontrons aujourd’hui François-Xavier Loucheur, fondateur de l’agence de design Kix studio, aujourd’hui installé à Berlin.

    Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre formation et votre parcours professionnel?
    J’ai suivi une formation universitaire technologique de 2 ans, pour apprendre les process de conception et de production industrielle. En 1998, j’intègre l’Institut Supérieur de Design de Valenciennes (ISD) et je suis une post-formation au CNAM de Paris à la chaire de marketing de l’innovation en prospective ainsi que quelques cours aux beaux-arts.
    Suite à des stages en Allemagne, en France et aux USA, je commence à exercer en indépendant et je me vois confié un cours à l’ESAD de Reims et à l’ISD de Valenciennes. J’interviens ensuite ponctuellement pour des missions pour de grands groupes industriels. En 2007, je fonde KIX studio à Berlin avec un ami. Depuis 2009, j’assure la direction du studio, spécialisé dans la création de produits, principalement pour l’industrie de la musique, du sport, du Lifestyle, et de l’univers domestique.

    Sur quel(s) sujet(s) travaillez-vous en ce moment?
    En ce moment, je travaille sur une deuxième collection de montures solaires pour la marque berlinoise IC! Berlin. Je travaille aussi sur une adaptation du prototype Mousso Koroba pour une édition européenne avec un éditeur parisien, et également sur l’extension de la gamme de produits USBéton (projet autoédité en 2009). Les projets qui vont sortir prochainement seront un microphone de studio haut de gamme et un DJ-controller.

    Combien de personnes compte votre agence?
    L’effectif du studio varie entre 1 et 5 personnes. Selon l’agenda, le nombre et la particularité des projets, je fais appel à des compétences extérieures pour m’aider à les réaliser. J’assure la direction artistique et la sélection des intervenants.

    Quelle est votre méthode de travail habituelle?
    Je distingue deux méthodes de travail et deux gestions du temps différentes selon que je travaille pour une commande, réunissant un groupe de projet, ou que je développe une proposition personnelle visant à être éditée.
    Lors d’un projet de groupe, les temps d’étude sont relativement courts. Je compte alors sur l’énergie du groupe et l’alchimie entre les participants pour dégager rapidement des axes de recherches intéressants et stimulants. Je cherche l’unanimité des avis des collaborateurs pour les solutions choisies afin de préserver le plaisir à travailler ensemble et d’optimiser les chances de réussite du produit à venir sur le marché. Par expérience, un groupe de trois à quatre personnes est optimal pour faire naitre un nombre conséquent de concepts dans un délai court, et pouvoir établir un dialogue avec le client. La méthode est très visuelle et participative, basée sur la présentation, l’organisation et la sélection d’images d’inspirations, de sketchs, de prévisualisations et de maquettes de principe.
    Ma démarche personnelle est quant à elle basée sur la rencontre. Je suis attaché à l’idée de créer des échanges entre les cultures et entre les savoir-faire. Je m’inspire beaucoup de ce que je vois lors de mes voyages. Je questionne la notion de frontières: frontière entre les hommes et les cultures, entre vie professionnelle et vie personnelle, entre passion et travail, entre l’homme et son produit. Finalement, la création est le fruit d’une rencontre, presque un prétexte à la rencontre.

    Fréquentez-vous les blogs et sites Internet consacrés au design, et si oui lesquels?
    De manière assez irrégulière. Je peux citer notamment Designboom et Inhabitat, mais je n’y accorde pas beaucoup de temps dans la journée. Je suis abonné à des newsletters pour l’information sur les événements, et j’essaie de voir un maximum de produits en vrai sur des salons ou des expositions.

    Y a-t-il un ou plusieurs designers, ou créateurs, qui vous inspirent au quotidien?
    Les créateurs qui m’inspirent s’expriment aussi bien au travers de la danse, de la musique, de la mode et de l’art contemporain que du design.
    Je m’intéresse par exemple à Olafur Eliasson pour son travail de reproduction des phénomènes naturels et d’expérimentation de l’espace; à Pina Bausch et Sascha Waltz pour le process d’élaboration chorégraphique mis en place avec leurs danseurs; à Hussein Chalayan pour son questionnement sur les migrations et l’exil. Pour la musique, je pourrais citer les compositeurs Steve Reich et John Cage pour leurs expérimentations et improvisations. Des artistes comme Laurie Anderson et Mulatu Astatke m’ont beaucoup inspirés en concert. Dans les designers, je citerai en premier Achille Castiglioni puis les frères Campana, Jasper Morrisson et Max Lamb.

    S’il y avait une chose à changer dans le design?
    La perte du sens (ça doit être lié à l’époque).

    Quelle est la commande que vous aimeriez vous voire confier?
    Comme projet industriel, j’aimerai me voire confier le dessin d’une gamme d’outillage ou d’instruments de musique. Ce sont pour moi des produits nobles, car essentiels, et qui permettent à leurs utilisateurs de créer. J‘aime aussi les haut-parleurs et les synthétiseurs, ainsi que les produits générant du son d’une manière générale.
    En dehors de ça, réaliser et aménager une maison en terre! Il paraît que l’on peut réaliser sa propre maison pour moins de 2000 euros. Si ça permet de ne pas s’endetter pour 30 ans, je trouve l’idée séduisante. En plus chacun peut personnaliser sa maison.

    De votre point de vue, le métier de designer est-il enviable aujourd’hui?
    Bien sûr, le designer a la chance de pouvoir imaginer et concrétiser le fruit de son imagination. En ce sens, il peut intervenir sur son environnement et tenter de l’améliorer. La contrepartie, c’est qu’il est tiraillé entre l’imaginaire et le réel.
    On est dans une société d’hyper choix, on peut donc se poser la question de la nécessité de continuer à créer et produire toujours de nouvelles choses. Mais je vois devant nous de grands champs d’investigations dans l’étude du vivant et des écosystèmes, et dans l’apport technologique en matière de communication. Il en résulte un bouleversement des styles de vie et finalement une plus grande liberté.

    Pour finir, un livre, un site Internet, un film, une découverte récente… que vous auriez envie de partager avec nous?
    Un film: Cabaret de Bob Fosse / Un livre: The new gypsies de Ian Mckell / Un disque: Party girl de Chinawoman.

    Quelques projets de François-Xavier Loucheur:


    « Mousso Koroba ». Prototype de rocking-chair réalisé à Bamako (Mali).


    « Rollnet ». Emblématique filet de ping-pong enroulable d’Artengo (IF design award).


    « USBéton ». Projet réalisé en collaboration avec Kevin Léné.


    « Tanagra ». Guitare de scène de la dernière tournée Mister Mistère de Mathieu Chédid. Collaboration avec Kevin Lecoutre.


    Extrait de la collection de montures dessinées pour la marque berlinoise IC! Berlin (design: équipe Kix studio).


    Proposition de table de restauration pour l’hôtel Adlon-Kempinski de Berlin. Collaboration avec Rémi Bigot.

    Projets et photos © Kix studio.

    En savoir plus: www.kix.fr.

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