• N’ayez crainte, designers, on s’occupe de vous!

    Par Alexandre Cocco.

    Comment, en tant que designer, trouver ses premiers clients et se faire remarquer? Et de quelle manière être certain, pour une entreprise, de confier son projet à la bonne personne? Pour pallier ces relations difficiles entre clients et créateurs, des solutions existent. Et certaines, récentes, sont plutôt étonnantes.

    Depuis plusieurs années, comme dans le domaine artistique ou sportif, des agents jouent le rôle de médiateurs entre des designers et des entreprises. Cette pratique, désormais courante, a permis à plusieurs projets marquants de l’histoire récente du design de voir le jour, comme par exemple le désormais célèbre verre Perrier dessiné par Martin Szekely en 1996 (Agent Kreo).

    Habitués à traiter avec le monde de l’entreprise, ces intermédiaires rassurent les donneurs d’ordre et sont à-même de leur proposer le ou les designers de leur “pool” le plus adapté à leur besoins.

    Ce dispositif, s’il a fait ses preuves, connait cependant certaines limites: il ne se concentre tout d’abord que sur des projets d’une certaine ampleur ou émis par des clients importants, et d’autre part il n’est pas facile d’y faire sa place, ces agents s’occupant d’un ensemble volontairement réduit de créateurs, dont ils connaissent et suivent le travail.

    Une nouvelle offre

    Est-ce pour pallier ce manque ou par opportunisme commercial, de nouveaux types de services sont récemment apparus, notamment sur Internet. Trois sites ont ainsi été lancés il y a quelques semaines, chacun d’entre eux se proposant de faciliter le travail des créatifs en les mettant en relation avec des commanditaires ou des partenaires susceptibles de les aider à faire aboutir leurs projets.

    Avec WithDesigners, les entreprises peuvent déposer gratuitement leurs appels d’offre en ligne. En tant que créateur, vous avez ensuite la possibilité de répondre, chaque mois, à 10 d’entre eux, à condition d’opter pour un abonnement mensuel à partir de 19,50 euros. Si elles le souhaitent, les entreprises peuvent également bénéficier de conseils (aide à la rédaction du brief, présélection de designers…), moyennant une somme égale à 15% du montant du projet.

    Chez Go2prod, les designers ont la possibilité de présenter leurs projets en attente d’édition sur le site, à condition de s’acquitter d’un forfait annuel de 120 euros par projet. Ceux-ci seront alors consultables par les entreprises ayant opté pour le “Pack Veille” (abonnement annuel de 500 euros). Les designers peuvent également, gratuitement, consulter les appels d’offre déposés par des entreprises, ces dernières ayant du s’acquitter de montants allant de 3 à 6000 euros pour pouvoir les publier.

    Chez Appel à Création Design, il n’y a pas d’abonnement. Pas d’appel d’offre d’entreprises non plus, mais des sujets déposés par les créateurs du site et étant considérés comme “porteurs”. En réponse à ces thématiques, vous pouvez envoyer une ou plusieurs propositions, moyennant un forfait de 18 euros par création, et le site se chargera de faire le relai avec d’éventuels industriels que celles-ci pourraient intéresser. Par ailleurs, si votre projet abouti, le site Internet nous annonce que la rémunération sera répartie entre le créateur et Appel à la Création Design, ce qui est aussi le cas chez Go2prod.

    Fonctionnement simple, prix réduit… et service minimal?

    Si les bonnes intentions de ces sites – visant principalement à rapprocher l’offre et la demande – sont louables, leur fonctionnement mérite cependant d’être interrogé.

    De quelle manière en effet vont-ils réellement jouer le rôle d’interface s’ils reçoivent plusieurs centaines de propositions? Est-ce que pour quelques dizaines d’euros, un regard attentif va être porté sur chaque projet? Qui va en interne juger les créations ou assurer le relai des demandes des entreprises? Selon quels critères?

    Chez Appel à la Création Design, on nous promet un “Comité scientifique consultatif”, dont la composition “pourra être communiquée aux auteurs des créations sélectionnées”. Le mystère plane!

    Withdesigners et Go2prod se veulent plus pédagogiques et plus rassurants. Ils expliquent notamment aux entreprises comment décrire leurs besoins et élaborer un brief. Le site de Withdesigners décrit également précisément, pour les designers, les différentes étapes du projet, avançant des idées intéressantes au niveau du règlement (avec versement en ligne d’un acompte de la part du client dès le lancement du projet).

    Ces initiatives sont très récentes, et il faut maintenant en juger la pertinence dans le temps. Souhaitons, peut-être candidement, qu’elles fonctionnent et qu’elles permettent à des créateurs de faire aboutir leurs projets et de trouver de nouveaux clients. Espérons par contre qu’il ne s’agisse pas de simples opportunités commerciales, visant à exploité la difficulté que le design a parfois à pénétrer le monde de l’entreprise…

    —–

    Le site de Withdesigners:

    http://withdesigners.com/

    Le site de Go2prod:

    http://go2prod.com/

    Le site de Appel à création design:


    Cet article est paru, dans une version légèrement différente, dans le magazine d’A numéro 195.

    Nous vous recommandons également la lecture, en complément, du texte “Liens designers-entreprises” publié par Nicolas Minvielle sur le site design-blog.info.


    8 commentaires

    1. François-Xavier Faucher dit:

      Merci Alexandre pour votre article,

      En tant que dirigeant fondateur de la société Go2prod, j’aimerais préciser un élément fondamental de notre offre :
      Les prestations de Go2prod reposent effectivement sur une plateforme Internet, mais aussi et avant tout sur un socle d’accompagnement aux niveaux commercial, juridique, et gestion de projet.
      - A ce titre, dans le cas des Projets ouverts à l’édition, nous effectuons une prospection active pour le compte des designers, en plus de la consultation par les entreprises abonnées (à noter que sur la période de lancement les deux premiers dépôts de projets sont gratuits pour les designers).
      - Dans le cas des Appel à projets, le montant versé par l’entreprise pour la prestation nous permet d’effectuer une prestation qualitative d’accompagnement (comportant entre autres l’analyse du besoin, la rédaction d’un brief adapté, l’aide à la sélection des dossiers adéquats, l’aide à la contractualisation…) engagée dans la réussite du projet de l’entreprise avec le designer. Dans le même souci de qualité de service et d’éthique, nous refusons les appels à projets non rémunérés.

      N’hésitez pas à me contacter pour poursuivre cette discussion et merci pour vos encouragements !
      Bien cordialement,
      François-Xavier Faucher, Président de la SAS Go2prod, le hub du design et de l’industrie
      http://go2prod.com/

    2. Bertrand de L'Edito dit:

      Bonjour,
      Ce n’est pas tant que je veuille absolument tirer la couverture à nous, mais chez L’Edito http://www.ledito.com nous recevons souvent des appels d’offres pour le marché professionnel (auditoriums, aménagement de bureaux, aménagement de magasins en franchise, voire création d’identité visuelle…) Nous soumettons systématiquement ces offres à tous les Designers qui nous ont contacté pour nous proposer leurs projets en Coédition (i. e. édition par la « communauté participative » des internautes, à la MyMajorCompany en quelque sorte), que ces projets aient été retenus ou non.
      Je ne sais pas si ce modèle répond aux attentes que vous formulez ici, bien que cela m’ait initialement semblé être le cas ?
      Au-delà de ça, si le fonctionnement de L’Edito vous intéresse, n’hésitez pas à me contacter.

    3. slasha dit:

      Top!

    4. Oilivier dit:

      A une époque ou nous pouvons rencontrer des « designers » qui sont contre la société de consommation, contre la marketing, contre les marques, contre l’argent, contre la pub, contre les règles de travail dans l’entreprise, contre la hiérarchie, contre les entreprises qui font des bénéfices… etc… Il peut être fort utile de tenter d’expliquer à ces « designers »deux ou trois trucs.
      Mais je me demande comment cela se fait que de tels « designers » aient du mal à s’introduire en entreprise. Cela doit être la faute du capitalisme!

    5. waldezign dit:

      « A une époque ou nous pouvons rencontrer des « designers » qui sont contre la société de consommation, contre la marketing, contre les marques, contre l’argent, contre la pub, contre les règles de travail dans l’entreprise, contre la hiérarchie, contre les entreprises qui font des bénéfices… etc… Il peut être fort utile de tenter d’expliquer à ces « designers »deux ou trois trucs.
      Mais je me demande comment cela se fait que de tels « designers » aient du mal à s’introduire en entreprise. Cela doit être la faute du capitalisme! »

      Quel est l’intérêt de ce commentaire?

    6. Oilivier dit:

      Dans le texte, la phrase suivante est écrite: « la difficulté que le design a à pénetrer le monde de l’entreprise ».

      Souvent certains « designers » ont une difficulté à se vendre pour des raisons de positionnement « politique » face au monde réél et d’aujourd’hui.
      Des « designers » qui ont ce genre de difficultés, comment pourraient-ils prétendre à être dans une démarche argumentaire assez construite pour « vendre » leurs produits à leurs partenaires: clients,ingénieurs, productions, marketings, financiers…
      Ne soyons pas ridicule! Vouloir positionner le « designer » en dehors du monde de l’entreprise et de la société réélle et s’étonner d’une difficulté à pénétrer le monde de l’entreprise!
      On ne peut pas se vautrer dans la fuite verbale et s’étonner d’un manque de reconnaissance du monde de l’entreprise.

      Ces « designers » ont besoin d’aide. C’est évident. Comme les artistes ont besoin de d’aide, de coach, d’agent….Ces « designers » ne sont-ils pas d’ailleurs plutôt des artistes?
      Ces « designers » ne sont pas plus de la MDA?

    7. waldezign dit:

      « la difficulté que le design a à pénetrer le monde de l’entreprise »: Il ne faut pas confondre le Design avec les Designers. Il est un fait que de nombreux entrepreneurs ont encore du mal à comprendre le Design et à appréhender tout le bien que pourrait leur apporter cette discipline un peu particulière.
      Ceci n’a rien à voir avec une quelconque idéologie du Designer (d’ailleurs, y en a-t-il une?).
      Enfin… je ne crois pas.

    8. Oilivier dit:

      le design a du mal à pénétrer le monde de l’entreprise parce que ses « ambassadeurs » ne sont pas biens positionnés. Comme je l’ai expliqué.

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