• [INTERVIEW] : La designer Elise Fouin

    Nous avons aujourd’hui le plaisir de poser quelques questions à la designer Elise Fouin, formée notamment à l’école Boulle. Cette chercheuse, toujours en veille pour nourrir son laboratoire personnel, expérimente tout. Aguerrie à créer à différentes échelles, elle collabore avec des marques, des éditeurs, et des institutions… Elle nous livre ici sa vision du design et du métier de designer :

    Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre formation et votre parcours professionnel?
    Je suis diplômée de l’Ecole Boulle: DMA orfèvrerie et DSAA Design Produits J’ai travaillé au studio d’Andrée Putman pendant 3 ans puis 5 ans au département de l’architecture des Galeries Lafayette. Ensuite j’ai monté mon propre studio et j’ai été résidente des Ateliers de Paris en 2011_2012.

    Sur quel(s) sujet(s) travaillez-vous en ce moment?
    Je travaille :
    - sur un projet de luminaire avec un artisan Japonais Yoshishige Tanaka, maître dans l’art de la technique du « Hyogu ». Dans le cadre du programme « Kyoto Contemporary« , nous somme une dizaine de designers à avoir développé un objet en partenariat avec un artisan et son savoir faire. Le résultat du programme sera exposé en janvier sur Maison & Objet.
    - sur une nouvelle collection de luminaires pour Forestier (pour fin 2018 / 2019)
    - sur la Direction Artistique des gammes de verre imprimées Saint Gobain,
    - sur un objet en soie avec sericyne, dans le programme d’innovation pour les textiles du R3ilab

    Combien de personnes compte votre agence?
    Nous sommes 3 personnes au studio. Je suis une petite structure et le revendique auprès de mes clients avec qui j’ai des relations humaines et privilégiées. Je m’adapte selon les projets avec des collaborateurs en free lance. Selon la taille des projets, nous avons déjà été jusqu’à une dizaine.

    Quelle est votre méthode de travail habituelle?
    Cela varie selon la demande, mais en règle générale, j’écoute, je visite, j’incube! J’ écoute la demande du client, je visite les sites de production, j’analyse le process de fabrication, je récupère de la matière quand cela est possible, puis je me laisse hanter… Si c’est un projet lié à la matière, on fait des expérimentations, des maquettes au studio, on regarde comment la matière se comporte, puis on dessine plus en détails les choses. et/ou je crobarde mes idées puis on les modélise sur ordinateur, puis on affine… On peut faire imprimer en 3D ou prototyper. J’ai l’habitude de travailler avec un prototypiste à Pantin qui trouve toujours des solutions à mes problèmes sans dénaturer l’esthétique du projet… Une fois la piste présentée au client et validée, s’en suit un jeu de ping pong subtil pour arriver au bon résultat au regard des contraintes de fabrication et de coût… 80% de mon temps consiste à me contorsionner pour trouver des solutions afin que le projet aboutisse tel que j’ai pu l’imaginer… Au Lycée j’étais meilleure en endurance qu’en sprint, ça me sert encore!

    Fréquentez-vous les blogs et sites Internet consacrés au design, et si oui lesquels?
    Je suis restée assez papier dans ce domaine… comme tout le monde je suis quelques actualités design sur instagram… mais je trouve tout ça extrêmement chronophage donc j’essaye de ne pas trop me faire happer par tout ça…!

    Y a-t-il un ou plusieurs designers, ou créateurs, qui vous inspirent au quotidien?
    Je me sens proche de certains designers dans leur approche mais ce qui m’inspire au quotidien, ce sont les gens, le quotidien, la nature, les usines, les usages, et comment les choses fonctionnent ou évoluent… J’aime rester curieuse et en veille dans tous les domaines!

    S’il y avait une chose à changer dans le design?
    L’image que les gens (les entreprises) ont de notre métier… qui n’est pas du tout la réalité terrain… Je rencontre tellement d’entreprises qui me disent que le design c’est pas/plus pour elles, alors que franchement elles en auraient bien besoin… Soit parce que l’on passe pour des êtres égocentrés qui ne veulent pas s’adapter aux contraintes, soit parce qu’on nous montre comme des stars qui vont coûter une fortune à l’entreprise pour finalement très peu de retours sur investissement… à part des retombées presse… Les designers doivent aussi faire attention à ce qu’ils véhiculent comme messages…

    Quelle est la commande que vous aimeriez vous voire confier?
    J’ai en tête une idée d’outil pédagogique lié au domaine de la santé pour le cancer, j’aimerais pouvoir le développer…

    De votre point de vue, le métier de designer est-il enviable aujourd’hui?
    Tout n’est pas blanc ou noir… Je suis heureuse de pouvoir travailler dans des domaines très divers, avec des problématiques très variées. J’ai encore le sentiment dans chacun de mes projets d’apprendre beaucoup de choses et d’apporter quelque chose à mes clients… J’ envisage mon métier dans une approche ouverte et ingénieuse du design plutôt que dans l’étroitesse d’un style qui deviendrait une recette… Cependant la rémunération des designers indépendants reste problématique. A niveau d’étude égal à une école d’ingénieur ou de commerce, le design n’est pas encore reconnu à sa juste valeur. Les entreprises embauchent des designers pour de l’exécution de concept marketing, alors qu’elles devraient placer le design et le designer en amont de tout et au coeur de leur stratégie de développement… Les gens pensent que nous sommes des pseudos artistes qui travaillons pour le plaisir et que cela ne nécessite pas vraiment de rémunération… Le designer analyse, crée, donne ses idées, parfois même réalise pour très peu d’argent en retour et en espérant…, là où un consultant va prendre au minimum 800 euros la journée pour donner 3 conseils sans obligations de résultats… Je ne compte même plus le nombre de personnes qui m’appellent pour travailler gratuitement en m’expliquant que c’est une chance, que ça va être valorisant et que je vais avoir de la communication…! Alors que, premièrement, je ne fais pas un projet pour avoir de la communication, l’objectif est d’apporter du sens et une certaine plus-value par rapport au besoin d’une entreprise… Deuxièmement c’est exactement l’inverse, les marques ont de la communication parce qu’elles ont travaillé avec un designer et non l’inverse…! Cela commence à changer mais il y a un vrai travail de pédagogie à faire…

    Pour finir, un livre, un site Internet, un film, une découverte récente… que vous auriez envie de partager avec nous?
    J’ai découvert The Art Design Lab chez Christie’s la semaine dernière, j’ai trouvé le concept de montrer l’esquisse, c’est à dire ce qu’il y a avant l’objet physique, assez intéressant. En effet le designer a rarement l’occasion de montrer cette phase d’un projet… (Nous avons eu le plaisir d’interviewer la fondatrice de The Art Design Lab, vous pouvez retrouver cette rencontre ici).

    - Découvrez quelques projets d’Elise Fouin :

    Suspension Clocher - Edition Granville Gallery - Structure hêtre & Tuile aluminium laqué 2017

    Console Saturne - Edition Drugeot Labo - Chêne Laqué 2015

    Valet Satellite - Edition Drugeot Labo - Chêne Laqué 2015

    Suspension Confettis - Edition Drugeot Labo - Chêne Laqué 2016

    Suspension Papillon - Edition Forestier - Acier thermolaqué 2015

    Photographies : © Elise Fouin Sur le même thème, retrouvez plus de projets en visitant notre catégorie portraits et interviews.


    1 commentaire

    1. Muriel dit:

      Cet article, comme la plupart de ceux publiés par la Revue du Design, est intéressant et permet de découvrir de nouveaux créateurs, designers. Je ne regrette pas mon abonnement à votre Newsletter que je consulte tous les jours. Cependant, la quantité de fautes d’orthographe contenue dans vos articles est hallucinante et pourrait nuire à la fidélité de vos lecteurs, c’est dommage… Si vous souhaitez que j’assure la re-lecture avant publication ?

    Laisser un commentaire